Levée de boucliers des médecins gaspésiens
Plus de 100 signataires
Pratiquement tous les médecins de la circonscription de Gaspé s’opposent à la loi 2 dans sa forme actuelle.
Une lettre adressée à l’intention du député Stéphane Sainte-Croix demandant la suspension de la loi 2 a recueilli pas moins de 119 signatures de médecins de sa circonscription, qui comprend aussi la Haute-Gaspésie et l’hôpital de Sainte-Anne-des-Monts. La circonscription compte très exactement 109 médecins. Quelques collègues de Chandler ont toutefois tenu à ajouter leur voix en soutien à leurs acolytes de la circonscription voisine. Il n’aura d’ailleurs fallu que 48 heures pour regrouper toutes ces signatures.
Pour Malika Cossette-Lavallée, instigatrice de la démarche et médecin-psychiatre au département de Services externes en santé mentale de l’hôpital de Gaspé, cette réponse rapide est caractéristique de la réception de la loi 2 sur le terrain.
« Ça me préoccupe beaucoup. Il y a plusieurs cibles qui sont axées sur le volume, donc le nombre d’actes médicaux et de rendez-vous ; la vitesse à laquelle les patients doivent être vus, dont à l’urgence. Le gouvernement veut s’ingérer dans notre façon de pratiquer alors que la médecine, c’est plus que ça. Ça implique de prendre le temps d’écouter le patient, le rassurer, répondre à ses questions et bien adresser les enjeux, notamment. »
La Dre Cossette-Lavallée cite en exemple une femme qui viendrait pour une fracture du bras.
« On ne fait pas juste la traiter. Il faut voir dans quel contexte. Est-ce qu’il y a de la violence conjugale ? Aussi, tout ce qui est soins palliatifs ou prévention, il faut prendre le temps de bien faire les choses. Un enfant ou un suivi de grossesse, encore là, ça peut être très variable. »
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Les médecins de la circonscription ont en outre adressé une douzaine d’enjeux imposés par la loi 2, au-delà de la valorisation du volume d’actes médicaux au détriment de la qualité. Parmi eux, il y a le risque de fermeture de cliniques médicales en raison d’un fardeau administratif accru et d’une viabilité financière insuffisante. Ou un exode médical et des départs anticipés à la retraite, une réduction potentielle de l’offre de soins en région, la hausse du risque de découverture ou encore la difficulté accrue d’attirer et retenir de nouveaux médecins.
« Il y a un réel risque d’exode, de retraite anticipée, de désintéressement, de démotivation, précise Malika Cossette-Lavallée. Il y a des manques dans le système de santé pour plein de raisons, mais on n’y pallie pas avec par exemple davantage de ressources ou de blocs opératoires. Présentement, la loi 2, ça ne donne rien de plus pour les soins. Il n’y a qu’un seul scénario possible, c’est que ça nuit. »
Elle note d’ailleurs que le milieu fonctionne bien actuellement dans la circonscription de Gaspé avec plusieurs médecins de famille, et qu’il ne faudrait pas fragiliser un système bien rodé. If it ain’t broke, don’t fix it, comme disent les anglophones.
« Pratiquement tout le monde a un médecin de famille, ce qui n’est pas le cas ailleurs. C’est sûr qu’il va y avoir moins de relève. Tout ça, c’est un risque réel. C’est unanime et tous les médecins sont inquiets », conclut Malika Cossette-Lavallée.

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